Réponse cas du jour 24
Description histologique
L’épiderme est d’aspect histologique normal. On observe un décollement jonctionnel artéfactuel. Le derme renferme sur toute sa hauteur une prolifération formée de cellules de grande taille, avec un noyau parfois excentré et des images de binucléations. Elles forment des nappes ou adoptent une disposition plus interstitielle en profondeur, avec des artefacts d’écrasement.
L’étude immunohistochimique montre une positivité de la cytokératine AE1-AE3 (diffuse intra-cytoplasmique), mais une négativité de CK20, chromogranine, synaptophysine, CK7, et TTF1. Les cellules tumorales expriment le CD79a (hétérogène, intra-cytoplasmique), le CD138 (diffus, membranaire), MUM1 ( diffus, nucléaire) et le CD56 (hétérogène, membranaire) mais pas le CD45, le CD20, le CD3. Il existe une monotypie lambda.
Diagnostic
Localisation cutanée d’une prolifération plasmocytaire : plasmocytomes cutanés extra-médullaires « secondaires » dans le cadre d’un myélome.
Commentaires
Cette patiente était suivie pour un myélome IgA lambda (ISS =3) diagnostiqué devant l’apparition de douleurs osseuses avec un pic monoclonal à 37 g/l et une nette infiltration plasmocytaire médullaire évaluée à 90 %. La cytoponction des nodules cutanés a montré la présence de nombreux plasmocytes dystrophiques.
Le myélome est une pathologie hématologique maligne caractérisée par une prolifération plasmocytaire monoclonale. Dans le spectre des manifestations cutanées du myélome, on distingue d’une part les lésions directement liées au myélome ou à un élément produit par les cellules tumorales (plasmocytome, amylose, cryoglobulinémie), et d’autre part les manifestations paranéoplasiques (scleroedème, scleromyxoedème, xanthogranuloma necrobiotique, xanthome, dermatose neutrophilique, pustulose sous-cornée).1
Les plasmocytomes cutanés sont rares et peuvent être « primitifs » diagnostiqués au stade de lésion unique, nodulaire, avec un risque d’évolution en myélome multiple, ou bien « secondaires », concomitants à un échappement thérapeutique, comme c’est le cas ici. Les patients associant myélome et plasmocytome cutanés présentent le plus fréquemment une immunoglobuline monoclonale IgG (56%) ou IgA (24%), en accord avec la distribution des Ig monoclonales dans les myélomes de manière générale. Certains auteurs ont décrit une fréquence plus élevée de myélome à IgA dans les plasmocytomes cutanés.2
L’expression des cytokératines est classiquement décrite comme rare dans les proliférations plasmocytaires.3 Une étude a cependant montré l’expression de cytokératines dans 5/14 proliférations plasmocytaires (incluant des plasmocytomes).4 La raison de cette positivité des cytokératines n’est pas complètement élucidée et présente un piège diagnostic ayant des conséquences aux plans thérapeutique et pronostique.5 Dans le cas présent, l’un des diagnostiques évoqués par le clinicien en plus du plasmocytome était le carcinome de Merkel…
Proposé par Raymond Karkouche, Stéphane Barete, François Le Pelletier, Damien Roosweil, Frédéric Charlotte (CHU Henri Mondor et Pitié Salpêtrière).
Références
1. Bayer-Garner, I. B. & Smoller, B. R. The spectrum of cutaneous disease in multiple myeloma. J. Am. Acad. Dermatol. 48, 497–507 (2003).
2. Kois, J. M., Sexton, F. M. & Lookingbill, D. P. Cutaneous manifestations of multiple myeloma. Arch Dermatol 127, 69–74 (1991).
3. Sewell IgD myeloma/immunoblastic lymphoma celsexpressing cytokeratin. 1–2 (2007).
4. Wotherspoon, A. C., Norton, A. J. & Isaacson, P. G. Immunoreactive cytokeratins in plasmacytomas. Histopathology 14, 141–150 (1989).
5. Shin, J. S., Stopyra, G. A., Warhol, M. J. & Multhaupt, H. A. B. Plasmacytoma with Aberrant Expression of Myeloid Markers, T-cell Markers, and Cytokeratin. Journal of Histochemistry & Cytochemistry 49, 791–792 (2001).
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